France : la loi considère les animaux comme des meubles

24 intellectuels ont signé un manifeste de la Fondation 30 millions d’amis réclamant que les animaux soient reconnus comme des «êtres vivants et sensibles» dans le code civil. Ces derniers sont actuellement assimilés à des «biens meubles», au même titre qu’un canapé ou qu’une télévision.

France : la loi considère les animaux comme des meublesSaviez-vous que votre chien n’est pas considéré comme un être vivant par le code civil? Alors que nombre de Français estiment que leur animal de compagnie est un membre à part entière de leur famille, le code Napoléon assimile l’animal domestique à un «bien meuble», que l’on peut vendre, acheter, et dont on est propriétaire, au même titre qu’une voiture ou qu’un canapé. Cette conception de l’animal remonte à l’époque de la rédaction des articles de loi: au début du XIXe siècle, l’animal était perçu comme un outil de travail indispensable aux travaux des champs, et l’on n’imaginait pas qu’il puisse ressentir quoi que ce soit.

«Cette définition est insensée aujourd’hui», réagit Réha Hutin, présidente de la Fondation 30 millions d’amis. Cette dernière vient de publier un manifeste signé par 24 intellectuels, dont Hubert Reeves, Michel Onfray ou Boris Cyrulnik, demandant à ce que le code civil soit révisé pour que les animaux ne soient plus «définis comme des choses», mais comme «des êtres vivants et sensibles». Ce dernier est accompagné d’une pétition qui sera remise à la garde des Sceaux, et qui compte aujourd’hui 250.000 signatures. Cette dernière indique: «je soutiens la proposition visant à modifier l’intitulé du Livre II du Code civil comme suit: “Des animaux, des biens et des différentes modifications de la propriété” avec un Titre 1er “Des animaux” où il devra être spécifié que l’animal est un être vivant et sensible.»

Pression des chasseurs et agriculteurs

Un tel changement dans les textes permettrait de mettre fin à une aberration de notre droit. «Depuis 1976, le code rural affirme que les animaux sont des êtres sensibles. Et le code pénal prévoit des sanctions en cas de maltraitance», explique Xavier Bacquet, avocat de la Fondation. Difficile donc de maintenir dans le code civil le caractère de «bien» des animaux, d’autant plus quand nos voisins européens ont fait progresser leur législation à ce sujet au cours des 20 dernières années. En Allemagne, le code civil fait la distinction entre les biens et les animaux depuis 1990, tandis que le Royaume-Uni a adopté en 2006 un «Animal Welfare Act». Ces législations ont en commun d’évoquer le «bien-être animal», ainsi que le «respect» et la «dignité des êtres vivants dotés de sensibilité».

La France a bien tenté de mettre au goût du jour sa législation au cours des deux dernières décennies, mais les tentatives ont jusque là échoué. En 2004, le ministre de la Justice Dominique Perben s’était emparé du sujet, qui avait conduit en mai 2005 à la publication d’un «rapport sur le régime juridique de l’animal». Ce dernier est resté sans suite. En 2012, le Conseil économique, social et environnemental (CESE) a dû abandonner des discussions sur un thème similaire sous la pression des représentants des chasseurs et des agriculteurs, au grand dam de l’instigateur du projet, Allain Bougrain-Dubourg.

«Il y a beaucoup de personnes réfractaires au changement de régime juridique de l’animal, car ils craignent que cela n’ait un impact sur leurs activités», souligne Reha Hutin. La chasse sera-t-elle encore plus encadrée? La législation en vigueur chez les éleveurs sera-t-elle plus stricte? «Nous voulons être clairs là dessus: notre démarche est modérée. Cela ne changera rien pour les différents acteurs économiques concernés», affirme Me Xavier Bacquet. «Il y a déjà une batterie de textes qui réglementent la chasse et l’agriculture. Nous voulons simplement harmoniser le droit», ajoute Réha Hutin.

«Le décalage entre les textes de loi et leur application est abyssal»

France : la loi considère les animaux comme des meublesPour les défenseurs des animaux, un tel changement juridique permettrait de modifier les mentalités, mais aussi de faire appliquer le droit existant. «Cela fait deux siècles que l’on apprend aux étudiants en droit que les animaux sont des choses. Ce n’est guère surprenant que les sanctions prises dans les tribunaux dans les cas de maltraitance soient souvent faibles», souligne Reha Hutin. Cette dernière prend pour exemple un éleveur qui a laissé mourir de faim vingt de ses chevaux, et qui a écopé de 500€ d’amende. «Un autre a été condamné à de la prison avec sursis alors qu’il avait fait traîner son animal sur des kilomètres en l’attachant derrière sa voiture».

«Le décalage entre les textes de loi et leur application est abyssal», déplore Jean-Pierre Marguénaud, professeur de droit privé et directeur de la Revue semestrielle du droit animalier. «Mais comme on considère les animaux comme des biens, on estime que toutes ces questions peuvent bien attendre ….» Cette conception juridique a des conséquences concrètes choquantes. Ainsi, lorsqu’un animal voyage en soute, et décède pendant le voyage, la majorité des compagnies aériennes et maritimes déclinent toute responsabilité. «On pourra vous proposer une compensation financière équivalente à une perte de bagage», ajoute Reha Hutin.

La Fondation 30 millions d’amis a bon espoir que son projet reçoive un écho politique favorable. «Nous avons pu unir 24 personnalités derrière notre texte, cela va donner une légitimité intellectuelle à notre combat», estime Reha Hutin. Jean-Pierre Marguénaud a aussi confiance. «Pendant longtemps, toute discussion sur le droit des animaux était tournée au ridicule. Aujourd’hui, nous sommes dans la phase de la discussion, et peut-être même à la limite de la phase d’adoption».

Source : LeFigaro.fr

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